Dès
la première phrase de sa réponse, le directeur d'«Achourouk» a d'emblée
donné le ton de sa conception de l'éthique et de l'éducation proprement
dite. «Nous, dans la presse algérienne (lire les journalistes des
jounaux)», écrit-il, « nous tenons pour ridicules pour leur manque de
professionnalisme, les journalistes de l'agence algérienne de presse
“APS”».
C'est votre droit, Monsieur le directeur, de prendre
pour ridicule l'Algérie tout entière. Sur ce terrain, nous ne vous
suivrons pas. Je ne pense pas qu'il existe au Maroc un seul journaliste
qui manque de respect pour ses confrères algériens. Votre mépris pour vos confrères de l'APS ne nous concerne pas. Il ne peut nous intéresser.
A
eux qui savent autant que nous par quel canal votre journal est
biberonné, en termes de dinars s'entend, de vous répondre ou de
s'abstenir de le faire. Passons à présent sur ce détail qui perfore par
sa méchanceté la dignité d'une large catégorie de journalistes
algériens, pour parler de « la liberté » d'expression illimitée en
Algérie, décrite dans vos sous-entendus, et de l'inexistence de cette
liberté au Maroc sur laquelle vous êtes catégorique.
Je ne
m'étalerais pas non plus sur ce point. Je me contente tout simplement
de dire que je préfère mille fois notre «manque» de liberté
d'expression qui n'a conduit à ce jour aucun journaliste marocain en
prison pour ses opinions, à cet « océan» de liberté en Algérie qui
broie plumes et encriers à Alger, avec à l'heure actuelle, trois
journalistes croupissant dans leurs cellules, et pas moins de dix-huit
procès de journalistes en instruction.
Je me demande franchement si le directeur d'«Achourouk» vit en Algérie ou ailleurs ? Quant
à cette autre « vérité » d'«Achourouk» qui veut qu'au Maroc il n'y a
pas de presse, je rappelle à son directeur qu'à chaque fois (c'est
quasi quotidien) que la presse algérienne dans la multitude de ses
titres, s'attaque au Maroc, elle le fait le même jour, sur le même
sujet, avec les mêmes idées et très souvent les mêmes expressions.
Traduisons : silence on souffle.
C'est d'ailleurs par ce souffle
fort, qui, par la maladresse de ses auteurs et de ses porteurs,
parvient jusqu'à nos oreilles, que nous apprenons par la bouche du
directeur d'«Achourouk» que le Maroc a peur de l'Algérie. Une vraie
trouvaille.
Je rappelle à Monsieur le directeur (le rappel est
bénéfique pour les croyants «Coran») que le défunt Président Boumediène
avait un jour de sa vie, fait sourire le monde entier en disant : «La
Monarchie marocaine représente un danger pour la révolution algérienne
».
Alors, qui a peur de l'autre ? La question est toujours
d'une brûlante actualité quand on sait que ceux qui sont actuellement
aux commandes en Algérie, ont grandi pour la plupart dans l'école
Boumediène. Il semble bien que Monsieur le directeur est, soit un
nouveau venu, soit une plume sans mémoire. Dans l'une et l'autre des
deux hypothèses, il y a beaucoup à dire.
Le directeur d'«Achourouk» est allé même jusqu'à nier que l'Algérie offre gîte et couvert au «polisario».
Le
«polisario», Monsieur le directeur, n'est établi ni aux îles Comores,
ni dans la Baie des Cochons, mais bien à Tindouf en plein territoire
algérien.
S'agissant du mur de Berlin évoqué dans le commentaire
de la MAP, le directeur d'«Achourouk» n'a voulu y faire voir pour ses
lecteurs, pour autant qu'il en a, que la pierre et le fer, et, jouant
sur les mots à défaut d'arguments, il assène dans l'amalgame une toute
autre vérité, à savoir que les Juifs (c'est son terme) avaient
expérimenté le mur au Sahara avant de le construire en Palestine.
Bravo
! Vous aurez pu être plus explicite, Monsieur le directeur, pour dire
que le Maroc n'avait fait appel aux «Juifs» qu'après avoir tiré de sa
tombe Monsieur Maginot, qui s'est dit oublieux de ses techniques après
tant d'années passées sous terre.
Quand l'imagination est à ce
point fertile, on ne doit pas se priver d'y creuser à volonté. C'est ce
que vous avez fait en parlant de Tifariti comme zone libérée. Je
m'empresse de vous rassurer qu'au Sahara marocain, il n'y a pas de
territoires libérés et il n'y en aura pas. Enchaînant dans cet obscur
labyrinthe, Monsieur le directeur affirme que l'Algérie n'a pas
construit de mur ni au Sahara, ni sur ses frontières avec le Maroc.
Soit ! Mais qui a fermé la frontière maroco-algérienne en en faisant un
mur entre les deux peuples frères ?
La décision est venue
d'Alger. Si ce n'est pas l'Algérie comme vous le dites, et puisque ce
n'est pas le Maroc comme le monde entier le sait, c'est qui ? Le
«polisario» soudainement passé de l'élève pris en otage au maître ? Monsieur le directeur n'a certainement pas besoin qu'on lui souffle des idées pour répondre à cette question.
En
vous lisant, Monsieur le directeur, j'ai compris que sans le biberon,
votre journal «Achourouk» ira tout droit à son crépuscule (Al Ghoroub),
au grand bonheur de ceux parmi les journalistes algériens pour lesquels
vous avez gravement manqué d'égards. La polémique est un art que j'apprécie, pour peu que le vis-à-vis soit intellectuellement un adorable pamphlétaire. |