Dix-sept ans après l'UMA toujours à la peine
Nouakchott, 17-02-2006 (Le Matin)
L'événement
était sans précédent et l'émotion à son comble le 17 février 1989 à
Marrakech : Le souci d'unir les rangs et de rapprocher les peuples
maghrébins a été traduit, et de la plus belle manière, dans les faits
quand les cinq dirigeants du Maroc, de l'Algérie, de la Tunisie, de la
Libye et de la Mauritanie signèrent l'acte de naissance de l'Union du
Maghreb Arabe (UMA).
C'est aujourd'hui vendredi que les cinq pays souffleront les 17 bougies
de cette union qui demeure, en dépit d'un bilan des plus minces, un
choix stratégique et une entité régionale incontournable en vue de
faire face aux défis et exigences de la mondialisation. C'est en ce
jour mémorable que les peuples maghrébins ont, enfin, vu se réaliser la
volonté politique des dirigeants des cinq pays qui a rejoint leurs
aspirations à plus de rapprochement, de concorde et de développement.
Dix sept ans après l'événement de Marrakech, force est cependant de
constater qu'aucun progrès significatif n'a été accompli dans la mise
en œuvre des objectifs de l'UMA, qui se trouve toujours dans l'impasse.
En dépit d'une conviction largement partagée quant à la nécessité de
relancer l'action maghrébine en vue de permettre à ce groupement
régional de remplir pleinement le rôle qui lui échoit, l'UMA tarde à
prendre son envol dans une conjoncture où seuls les grands ensembles
ont droit de cité.
Certes, après un bon départ au cours des premières années, marquées
notamment par la mise en place d'organes et structures indispensables à
son fonctionnement et la conclusion d'une série de conventions et
accords se rapportant à différents secteurs (économie, justice,
administration, sport), le processus maghrébin a accusé, quelques
années plus tard, une certaine lenteur.
Cette situation de «non Maghreb» a affecté aussi bien les mécanismes
que les activités de l'UMA alors que d'autres groupements similaires
commençaient à être opérationnels et font de plus en plus preuve
d'imagination créative, d'efficience et de dynamisme.
L'UMA a, en effet, été pénalisée par des divergences, notamment
politiques, entre ses membres. Pour preuve aucun sommet ordinaire n'a
été organisé depuis 1994.
Bien que les responsables des cinq pays continuent de se rencontrer
périodiquement, les résultats auxquels aspirent les peuples maghrébins
tardent à venir et les échanges commerciaux intermaghrébins restent
nettement en deçà des potentialités des uns et des autres puisque ne
dépassant guère les 5 % du volume global du commerce extérieur des pays
du Maghreb.
Toutefois, les pays de l'UMA, dont le nouveau secrétaire général, le
Tunisien Habib Ben Yahya, vient d'être désigné pour un mandat de trois
ans en remplacement de son compatriote, Habib Boularès, ne désespèrent
pas d'imprimer une nouvelle dynamique à cette entité, afin que le 17
février de chaque année ne se réduit pas à une simple date anniversaire
où l'on se contente de regretter avec amertume les rêves perdus et les
espoirs déçus.
L'espoir donc est de voir les festivités marquant le 17e anniversaire
de la création de l'UMA insuffler vie à cette union et de voir un jour
le processus, enclenché à Marrakech, remis sur la bonne voie d'autant
que les chefs d'Etat du Maghreb ne cessent de réaffirmer, à maintes
occasions, leur attachement à l'édifice maghrébin.
Nul doute, le diagnostic est sans appel : il faut réactiver le
processus d'intégration maghrébine pour être au rendez-vous de
l'Histoire et répondre aux attentes légitimes des populations.
Les observateurs estiment, en effet, qu'il est grand temps que les cinq
pays maghrébins s'associent pour surmonter leurs différends
conjoncturels et œuvrer de concert en vue d'exploiter en commun les
multiples opportunités et les grandes potentialités dont regorge la
région, afin d'être au diapason des grandes mutations qui s'opèrent à
l'échelle mondiale et régionale, notamment la mise en place à l'horizon
2010 de la zone de libre-échange euroméditerranéenne.
Le Maroc, qui reste indéfectiblement attaché à l'idéal maghrébin, ne
cesse d'intensifier les efforts en vue de relancer cette union et de
réactiver ses structures, conformément au traité de Marrakech et dans
le respect de sa souveraineté et ses intérêts suprêmes.
Le Traité de Marrakech instituant l'UMA stipule justement que les Etats
membres s'engagent à ne tolérer sur leur territoire aucune activité ou
mouvement pouvant porter atteinte à la sécurité ou l'intégrité
territoriale d'un Etat membre ou à son système politique.
Il affirme également l'engagement des Etats membres à ne pas adhérer à
une alliance militaire ou politique dirigée contre l'indépendance ou
l'intégrité territoriale des autres Etats membres (article 15).
Le Traité comporte, en outre, une vingtaine d'articles prévoyant la
création d'un certain nombre de structures, notamment le Conseil
présidentiel, l'instance suprême, un Conseil des ministres des Affaires
étrangères, un Conseil consultatif, une instance judiciaire, un Comité
de suivi et un secrétariat général.
Il stipule également que l'Union vise, entre autres, la mise en œuvre
progressive de la liberté des personnes, des biens, des services et des
capitaux entre les pays membres, autant d'attentes déçues et
d'objectifs qui tardent à se concrétiser.